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Je te donne ma parole

L'amour infini pour mes enfants

  

Rose en avait vécu des années, elle y pensait alors qu’elle se reposait par un bel après-midi ensoleillé de décembre. Combien déjà? Cela n’a pas tant d’importance… 

 
 

Elle avait arrêté de compter à partir de 70 ans. Seule dans son appartement, elle réfléchissait à son passé. En fait, elle n’avait pas choisi de réfléchir, c’est plutôt son passé qui la rattrapait tout à coup. Non pas qu’elle était ce genre de personne qui se ferme à toute réflexion, ce qui l’étonnait c’était la ténacité de ses pensées qui ressassaient différents souvenirs tout à coup. 

 
 

Dans sa jeunesse, Rose se décrivait comme volontaire. Indépendante. Elle ne craignait pas de quitter une situation qui ne lui plaisait pour faire table rase et repartir à zéro. Tout à coup, elle s’interrogeait. Avait-elle tenté ainsi de ne pas faire face à ses responsabilités? Sans doute pas… car chacune de ses décisions lui laissait un sentiment de satisfaction. Peut-on se tromper à ce point? 

 
 

Non. Elle savait bien qu’il y a en chacun de nous une intuition, une petite voix, un quelque chose qui nous informe de la justesse de notre route. Elle avait tout de même senti le besoin d’écrire à ses enfants devenus adultes. Leur expliquer le pourquoi de ses agissements. Il faut dire que la décision de laisser ses enfants avait été une des plus dures de sa vie. 

 
 

Comme son frère le lui avait souligné, il n’est pas nécessaire de s’excuser auprès de ses enfants. C’est bien vrai! Pas obligée. Elle avait quand même choisi de le faire. Rassembler son courage, écrire en quelques mots l’essentiel. Elle avait vite compris que cette décision était la bonne, vue la réaction de ses enfants. En effet, sa relation avec eux n’avait pas été coupée... Il s'est plutôt installé une forme de douceur, une compréhension accrue entre Rose et ses enfants. Il est vrai qu'elle n'avait toutefois pas répondu à sa question initiale. Ai-je été à la hauteur de ce que mes proches attendaient de moi? 

 
 

Le témoignage de Rose rassemble les ingrédients que l’on retrouve trop souvent dans les cas de rupture au sein d’un couple. Elle me raconte que la vie avec le père de ses enfants a été difficile. Son propre père l’avait pourtant prévenue au tout début de leur relation; il avait remarqué comme cet homme buvait beaucoup trop. Mais la désinvolture de sa jeunesse avait fait croire à Rose que cet homme était le sien. Après tout, ils s’étaient fréquenté cinq ans avant de se marier!

 
 

Un autre personnage apparaît dans son récit. C’est sa grande sœur, Solange. Rose me raconte que c’est elle qui s’était occupée de tout pour le mariage. C’est que depuis le couvent où les deux sœurs avaient grandies plus ou moins ensemble, la grande sœur avait toujours pris le parti de protéger sa petite sœur. Selon Rose, ayant toujours le regard teinté de la petite sœur, Solange comprenait des choses qu’elle-même n’arrivait pas à percevoir. À preuve, elle avait su voir le jeu qu’imposait la violence son futur mari quand il buvait trop. Rose aurait pu le jurer quoique… malgré cette sensation, elle lisait aussi la retenue dans l’attitude de sa grande sœur, comme si elle n’osait s’interposer dans leur couple. 


Ce que Rose percevait en fait, c’est la perplexité de Solange. Solange cherchait à définir ce que peut être un couple. Dans sa propre vie, c'était un homme qui l’avait délivrée de toute sa solitude en faisant naître dans son cœur l'espoir. Ce sentiment d’être soutenue. Sa petite sœur pouvait-elle vivre la violence auprès de son homme? Comment distinguer la relation saine de celle qui est malsaine? Toujours, persiste un doute. 

 
 

Solange aimait sa sœur et souhaitait la protéger. Elle ignorait toute la force de Rose. C'est que Rose occultait sous son coté candide, sous ses allures de fuite, sa ferme volonté de se battre pour sa liberté et son autonomie. Pour cette famille un peu bourgeoise de Montréal, vivre en chambre, puis en appartement, et se marier passé les trente ans, n’était pas un chemin docile. Cela réclamait, selon Solange, des remparts de sécurité qu’elle allait offrir à sa sœur toute sa vie. 

 
 

Elle avait donc pris sous son aile, l’idée du mariage de sa sœur. Elle allait choisir de payer sa robe de mariée et de tenter d’organiser la cérémonie. Il fallait sans doute, tenter de préserver l’honneur de la famille, famille éprouvée déjà par le divorce de leurs propres parents. 

 
 

Ce mariage, s’était vite transformé un rituel de peur. Ainsi, Rose raconte un épisode de sa vie où elle avait eu très peur de cet homme grand et musclé. Un soir, après avoir trop but, elle était dans la voiture avec son époux et ses enfants. Suite à une dispute, l’homme les avait tous laissés sur la route de Mascouche. Elle ne savait pas comment s’en sortir, c’est bien vrai. Pourtant elle préférait être sur le bord de la route que d’être horrifiée à ses côtés. Cela lui avait permis de comprendre une part de la dynamique qui s’était installée entre eux. Elle ne m’a pas raconté comment elle s’en ait sortie, mais se souvient avoir parlé à Solange de cet événement.

 
 

Devant le mari ivre, Solange avait depuis lors adopté l’attitude que la fautive était Rose. Elle savait bien que se dresser contre son beau-frère n’aurait rien apporté de bon à sa relation avec sa petite sœur. Elle préférait donc faire des remontrances à Rose devant son mari ou lui suggérer de ne pas trop se plaindre. Mettre de l’eau dans son vin. De l’autre côté, toujours, elle volait à son secours lorsque l’homme dépassait les bornes. La problématique dépassait le courage de Solange.

 
 

De toute évidence, ce combat était celui de Rose. Il n’y avait qu’elle pour le résoudre. Ce courage elle l’a trouvé à travers l’amour de ses enfants. En effet, un jour, le mari violent allait frapper sa fille. Rose avait préféré se mettre entre les deux. Bien sûr, elle était terrifiée, mais avait trouvé le courage de s’interposer. C’était le début d’une prise de conscience qui allait s’amorcer et ne jamais prendre fin. Encore aujourd’hui, on le devine aux paroles de Rose, elle est imprégnée de l’émotion, mais tout de même portée par la force qu’elle avait découvert en elle. 

 
 

Rose dit avoir trouvé un autre cran de courage le jour où elle a vu que sa fille avait laissé sur le plancher un flacon de médicament ouvert. Avait-elle avalé ou pas les médicaments? Je ne le savais as, me dit-elle. Cependant, ce que je savais, c’est que je devais intervenir. La situation était trop dure pour ma fille. 

 
 

J’avais observé cette scène à travers la fenêtre, me confia-t-elle, car déjà, je n’habitais plus avec le père de mes enfants. J’avais choisi de m’éloigner de lui et de laisser mes enfants avec l’homme qui savait apporter un salaire pour pourvoir à leur besoin. J’espérais le mieux pour eux, incapable de subvenir au besoin de mes enfants. Ce jour là, je suis entrée par la fenêtre du sous-sol, car cette maison, je ne l’habitais plus. J’ai demandé à ma fille où était son père. Elle a répondu : il est chez le voisin. J’y suis débarquée, chez le voisin et j’ai dit : il faut appeler l’ambulance. Je me suis dressée à nouveau devant lui pour exiger qu’il appelle l’ambulance. Chose qu'il a fait.  Heureusement pour sa jeune fille, rien de grave n'en est découlé.

 
 

Rose exprimait avoir toujours vécu dans la pauvreté, entourée de gens qui cherchaient à médire pour pouvoir obtenir un soupçon de reconnaissance. Elle a tenté souvent d’aider les gens à sa façon, via des comités, des responsabilités qu’on lui octroyait. Toujours, elle avait pour réponse des actions défavorables des gens qui jalousaient sa position. Alors, elle se retirait pour se dégager de cette critique qu’on lui servait. Aujourd’hui, elle cherche encore comment réagir quand les individus autour lui sapent son énergie. Tenter de rayonner le bien, n’est pas facile. 

 
 

Elle trouve le réconfort à travers son petit-fils et ses propres enfants qui ont sus comprendre sa vulnérabilité, mais aussi voir ses forces. Elle avait sa petite valise au couvent. Elle l’a trainée longtemps. Quand on a une valise, c’est facile de remballer sa vie et de se déplacer pour recommencer. Elle a toujours vécu sobrement. Pas besoin de beaucoup de richesse autour d’elle. Juste un petit confort pour se rassurer la nuit venue. Et aujourd’hui une oreille qui transmet son message aux autres : notre bien le plus précieux est notre vraie famille. Cette famille avec qui je peux être moi-même et m’accorder un répit.


Rose

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